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Radio RCJ: « Quand un calamar colossal titille notre susceptibilité »

  • Photo du rédacteur: gabriellehalpern
    gabriellehalpern
  • 24 juin
  • 2 min de lecture

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Cette chronique est présentée par Gabrielle Halpern chaque mardi dans le journal de 12h sur la radio RCJ et vous offre un regard philosophique sur l'actualité.


"Bonjour à tous ! Un calamar colossal a été filmé pour la première fois dans l’océan. Cette phrase ressemble à un titre de journal, c’est d’ailleurs le titre d’un article proposé par Le Figaro[1]. Je ne sais pas si, ayant lu ce titre, vous auriez eu envie de cliquer pour lire l’article, mais moi, cela a suscité ma curiosité, alors j’ai cliqué. Les premières lignes de l’article nous donnent plus d’informations : « Un calamar colossal a été filmé pour la première fois en pleine mer par une équipe de chercheurs depuis la découverte de l’espèce, il y a près d’un siècle. Ce jeune calamar, d’environ 30 centimètres de long, a été repéré à 600 mètres de profondeur dans l’océan Atlantique sud, près des îles Sandwich du Sud. Les experts estiment que les calamars colossaux peuvent atteindre jusqu’à 7 m de longueur et peser jusqu’à 500 kg, ce qui en fait l’invertébré le plus lourd de la planète ». Pour le moment, vous ne voyez pas forcément en quoi cela mérite une chronique Philo, attendez, soyez patients. Une phrase dans l’article m’a interpellée, je dirais même bouleversée. C’est Kat Bolstad, chercheur à l’université technologique d’Auckland (Nouvelle-Zélande) qui a participé à l’identification de l’invertébré qui a prononcé la fameuse phrase : « Je suis très heureuse que nous ayons vu pour la première fois un jeune calamar colossal. Cet animal est tellement beau. C’est passionnant de voir les premières images in situ d’un jeune colossal et humiliant de penser qu’ils n’ont aucune idée de l’existence des humains »…

 

« Humiliant de penser qu’ils n’ont aucune idée de l’existence des humains » ? Mais en quoi est-ce humiliant ? N’est-ce pas arrogant de penser que toutes les espèces vivantes devraient savoir que les êtres humains existent ? Et pour celles qui le savent, n’ont-elles pas suffisamment souffert de l’existence des humains ? En quoi serait-ce une bonne nouvelle pour elles ? Cette phrase m’a bouleversée, parce qu’elle exprime tellement fortement la vanité humaine, l’anthropocentrisme au nom duquel nous, les êtres humains, sommes convaincus que le monde entier devrait savoir que nous existons, et au-delà du monde, tous les univers, toutes les galaxies ! Au contraire, je pense avec émotion à ce calamar colossal et un sourire me vient à l’idée qu’il ne sait pas que nous existons, qu’il vit dans cette ignorance et qu’il vit quand même et qu’il n’a pas besoin de nous pour vivre. Mais pourquoi diable avons-nous pris au sérieux Protagoras, un penseur présocratique du Ve siècle avant l’ère chrétienne, quand il affirmait que « l’homme est la mesure de toute chose »[2] ? Pourquoi diable l’homme serait-il la mesure de toute chose ?"

 


[2] Gabrielle Halpern, Tous centaures ! Eloge de l’hybridation, Le Pommier, 2020. 

 


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Gabrielle Halpern

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