Cette chronique est présentée par Gabrielle Halpern chaque mardi dans le journal de 12h sur la radio RCJ et vous offre un regard philosophique sur l'actualité.
"Il n’y a rien de plus difficile que de demeurer optimiste en ce moment ; cela ne l’était déjà pas forcément avant ce qu’il s’est passé en Israël, - la marche du monde ayant de quoi nous désespérer -, mais c’est devenu presque impossible aujourd’hui. Mais même s’il arrive aussi aux philosophes de pleurer, il est de notre devoir de chercher une lueur d’espoir. Et c’est dans un roman que je l’ai trouvée. « La famille Karnovski » est un petit chef d’œuvre écrit par Israël Joshua Singer, frère de l’écrivain, prix Nobel de littérature Isaac Bashevis Singer. Ce livre publié en 1943 raconte l’épopée d’une famille sur trois générations.
Au père de famille qui vient se plaindre de son fils et des désordres du monde, un personnage répond : « Depuis ma naissance, j’ai vu des gens plonger dans la misère, la haine, les conflits, la guerre, la violence. L’histoire du monde, c’est une histoire d’envie et de haine, de pauvreté, de maladies, de guerres, de mort. Chaque fois, un nouveau déluge emporte tout, mais il se trouve toujours un nouveau Noé pour construire une arche dans laquelle il fait monter quelques animaux purs et beaucoup d’impurs, et le petit monde repart pour un tour. L’Ecclésiaste, ce grand sage, avait raison : on a déjà tout vu, il n’y a rien de neuf sous le soleil (…). Quand l’Ecclésiaste a écrit son livre, le peuple n’était pas meilleur. Quand Socrate et Platon prodiguaient leur enseignement, ils n’avaient qu’un cercle réduit de disciples (…). Ils ne se sont pas découragés pour autant et ont poursuivi leur route. Tout ce que l’on sème poussera. Le vent emporte une graine dans le désert et il en sort des plantes et des arbres qui donnent des fruits. Je dois poursuivre ma tâche ».[1]
« Il n’y a rien de nouveau sous le soleil », disait l’Ecclésiaste. Nous le savons tous, n’est-ce pas qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil ? Et pourtant, s’il ne faut pas perdre de vue cette idée, il nous faut faire comme si quelque chose de nouveau pouvait arriver. « Tout ce que l’on sème poussera » et nous devons poursuivre notre tâche. Il n’y a rien de nouveau sous le soleil, mais sous la lune et les étoiles, l’espérance en un monde meilleur a le droit de briller".
[1] Israël Joshua Singer, « La famille Karnovski », Editions Denoël 2008, p. 281-283.
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