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Radio RCJ: Musée d'art moderne de Paris - "Matisse et Marguerite: le regard d'un père : l’expérience du dessaisissement ?"

  • Photo du rédacteur: gabriellehalpern
    gabriellehalpern
  • 15 avr.
  • 2 min de lecture

Cette chronique est présentée par Gabrielle Halpern chaque mardi dans le journal de 12h sur la radio RCJ et vous offre un regard philosophique sur l'actualité.


« Le printemps est là, donc toutes les conditions sont réunies pour découvrir une extraordinaire exposition proposée par le Musée d’art moderne de Paris : « Matisse et Marguerite – le regard d’un père ». Matisse, c’est le père ; Marguerite, c’est sa fille. De tableau en tableau apparaît en creux une réflexion sur la paternité, et au-delà sur le rapport à l’altérité. Dans le travail de peintre de Matisse, tout semble mis en œuvre pour tenter de refléter parfaitement, de saisir pleinement l’enfant qui pose - ses émotions, ses pensées -, comme si le lien filial était un cordon ombilical permettant, par vase communicant, de se superposer l’un à l’autre, de se connaître ou du moins de se deviner. Mais c’est faire trop confiance au corps que de croire qu’un visage peut traduire tout ce qui se passe dans une tête ; c’est prêter trop de pouvoir à la peinture que de penser qu’elle peut retranscrire tous les non-dits. Les tableaux de Matisse ont beau être magnifiques ; ils demeurent néanmoins des témoins de son incapacité à connaître sa fille, à la traduire, à la saisir, à la retenir, malgré le temps qui passe.

 

On voit dans cette exposition combien la peinture est œuvre de projection : les tableaux représentent moins Marguerite que tout ce que son père projette sur elle et c’est là que cette exposition invite à une réflexion philosophique. Connaissons-nous vraiment ceux que nous aimons ? Ou ne connaissons-nous que ce que nous projetons sur eux ? Nous projetons nos couleurs, nos formes, nos lumières et nos ombres sur ceux qui nous entourent, mais ne nous échappent-ils pas sans cesse ? La haine que nous éprouvons envers certaines personnes ne serait-elle pas le trop-plein d’ombres que nous projetons sur elles ? La fille de Matisse, Marguerite, reprochait à son père le trop de lumière qu’il mettait dans ses tableaux ; arrive-t-il que l’on aime trop certains êtres au point de les brûler avec la lumière que nous projetons sur eux ?

 

Les photographies de Marguerite exposées dans le Musée d’art moderne de Paris provoquent un choc par rapport aux tableaux installés côte à côte, tant elles nous donnent à voir une jeune femme qui n’a rien à voir avec les tableaux du peintre. Ce décalage, ce choc, correspondrait-il à ce décalage qu’il y a entre la représentation que nous nous faisons de nos enfants, de nos parents, de notre conjoint et leur visage réel ? A travers ses nombreux portraits de sa fille, Matisse apprend – et nous apprenons avec lui – le douloureux chemin du dessaisissement. Apprendre à se dessaisir de nos enfants pour les laisser grandir et partir ; apprendre à se dessaisir de nos parents pour les laisser vieillir et mourir. Et au cœur de ce dessaisissement, apprendre à aimer l’irréductible altérité de l’autre ».


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